Le Monal et le lac du Clou, une échappée savoyarde mémorable !

lac du ClouC’est l’été, les vacances ! Ah, mon dieu quelle chance ! Prenez le temps de flâner et de ne rien faire. A la rigueur accordez-vous une sieste crapuleuse… Ou sinon allez donc prendre un grand bol d’air à la campagne, à la mer ou à la montagne. Selon où vous habitez, il y a forcément pas loin de chez vous un endroit ressourçant. Il ne tient qu’à vous de vous y rendre. J’habite une région magnifique et je suis tout près des Alpes. De plus j’adore la montagne ! Donc mon dernier bol d’air c’était le Monal, un minuscule hameau de Haute-Tarentaise et le lac du Clou, un lac d’altitude cerné par les alpages et les vaches Tarines. Je vous emmène pour la visite, histoire de vous donner envie d’aller vous aussi prendre un bol d’air ? Bon puis vous me verrez sous un autre jour après… Je ne vous en dis pas plus !

En route pour rejoindre le Monal

Depuis chez nous, le Monal est à plus de 170 km mais pour une excursion à la journée ça vaut le coup. C’est le cadeau de fête des mères de mon mari ! Une journée pour visiter le Monal et plus si la forme est au rendez-vous et elle y est !! La météo annonce une belle journée avec seulement de rares averses à partir de 17h. Après 2 heures de route, nous arrivons à 1700m d’altitude à 8h00. Nous laissons la voiture au Chanal pour continuer à pied. Selon mon ado préférée, nous sommes barjots de nous lever à l’aube un dimanche matin pour aller marcher dans la caillasse. Tout est question de point de vue et sur le sujet nous n’avons clairement pas le même.

chalets en pierre au Monal

Le Monal n’est accessible en voiture que pour les habitants et les éleveurs à condition d’emprunter une route qui monte sur la gauche après avoir dépassé Sainte-Foy-Tarentaise. A partir du Chenal il n’est possible de rejoindre le Monal qu’à pied. Au début, une petite route grimpe en lacets à travers quelques maisons montagnardes puis très vite, la route se transforme en piste caillouteuse. La piste se recouvre peu à peu d’herbe et traverse une belle prairie. Un festival de fleurs alpines me met immédiatement en joie.

la chapelle du Monal

Puis la piste se mue en sentier monotrace commençant à s’élever entre les rochers. Partout, des gentianes jaunes s’élancent vers le ciel et même des fraises des bois émaillent le bord du chemin pour le plus grand bonheur de mes papilles. Après une heure de montée nous arrivons au hameau. Un minuscule étang à l’eau limpide nous accueille, l’eau y est si froide que je ne peux y laisser la main.

Etang du Monal

Le Monal est un hameau miniature, vraiment minuscule à 1874m d’altitude. De magnifiques chalets du XVIII et XIX siècle donnent un aperçu de l’habitat montagnard. Il y a un éleveur de chèvres qui produit ses fromages sur place et un gîte d’étape pour les randonneurs. Une minuscule église de montagne est assise sur un rocher et un beau potager produit les légumes destinés aux randonneurs de passage. Un paradis pour se déconnecter : pas d’électricité, à part avec des groupes électrogènes, pas d’internet, pas de réseau !!!

Chalet du Monal

Poursuivre vers le Vallon du Clou

La balade pour aller au Monal est une balade familiale, facile à faire. Comme nous sommes en forme nous décidons de poursuivre jusqu’au lac du Clou. En commençant à grimper au-dessus du hameau, nous voyons les chèvres qui gambadent à leur guise dans la montagne, broutant les fleurs et les herbes médicinales à pleine bouche. Et là nous commençons à entendre siffler les marmottes qui annoncent notre passage à leurs congénères. J’en vois une qui fait la sentinelle sur son rocher et qui bondit prestement dans son trou lorsqu’elle nous aperçoit. Nous empruntons alors une sente assez raide qui traverse une forêt de mélèzes.

le Monal vu d'en haut

Nous montons donc consciencieusement à travers les arbres. En sortant du bois, le sentier débouche sur un replat rocheux, sorte de falaise qui surplombe le hameau du Monal. Les photos prises depuis ce point ont l’air d’avoir été faites par un drone. En face de nous, le Mont Pourri recouvert de neige laisse échapper de son glacier une cascade d’eau qui s’étire comme le voile d’une mariée plusieurs mètres plus bas. Nous entendons le fracas de la chute d’eau depuis le versant où nous sommes. La vue est somptueuse.

Rencontrer les marmottes des alpages du Clou

Nous poursuivons notre grimpette entre les arbres de plus en plus petits et les rochers pour déboucher finalement sur une piste caillouteuse carrossable. Tellement carrossable que nous manquons de peu de nous faire écraser par un quatre-quatre !! Et là tu te dis que c’est le comble. Tu viens de grimper comme un calud à travers les arbres et les rochers, ça fait deux heures que tu montes et tout ça pour se retrouver au bord de la route (ou presque). Nan mais oh ! En fait il s’agit de la piste qui monte depuis le Chenal jusqu’au Vallon du Clou. Nous laissons passer trois véhicules puis nous retrouvons le sifflement des marmottes avec grand plaisir. A partir de ce point il n’y a plus d’arbres, c’est le domaine des alpages. Les fleurs sont toujours partout mais elles ont une tige courte pour témoigner de la rudesse du climat à cet endroit. Nous réussissons à tirer le portrait d’une marmotte. Pour cela mon mari déploie des ruses de sioux, s’avançant le plus possible sans faire de bruit.

une marmotte

Manger des bonbons de lutins

Au Vallon du Clou, un barrage hydroélectrique coupe le ruisseau du Clou. Il sert à collecter de l’eau pour alimenter et réguler le barrage de Tignes. C’est ce qui s’appelle une prise d’eau. La piste continue vers le fond du Vallon du Clou où nous apercevons quelques maisons montagnardes, quelques véhicules agricoles ou quatre-quatre et des troupeaux de vaches et de chèvres. De l’autre côté des sommets, sur notre droite, c’est l’Italie.

Le barrage du Clou

Nous poursuivons notre route vers le lac du Clou en quittant la piste principale pour prendre un sentier d’alpage. Je commence à fatiguer un peu alors je mange un bonbon de lutin. Kécécé ? Une feuille d’ortie roulée en boule sous les aisselles (non je rigole), roulée en boule entre les doigts et hop à mâchouiller. Ça apporte des protéines, des minéraux et des vitamines en cas de coup de mou pendant une rando. J’en prépare une pour mon mari qui est toujours prêt à tester mes idées (je l’adore). Bon alors attention hein ! N’allez pas brouter les orties comme ça ! L’ortie ça se mérite. Il faut prendre des feuilles jeunes (car tendres). Vous saisissez la feuille par en-dessous (c’est là qu’elle pique le moins) entre le pouce et l’index vous la détachez de la tige puis précautionneusement vous la repliez sur elle-même jusqu’à avoir une boule que vous roulez copieusement entre les doigts pour casser les poils urticants responsables des démangeaisons. Et vous avez ainsi à votre disposition un concentré de protéine, de vitamines et de minéraux. Un produit dopant quoi. Lorsque les orties poussent au soleil elles ont un pouvoir urticant plus important. Il faut savoir aussi que la grande ortie est moins urticante que l’ortie brûlante. Les deux se consomment mais gare à la deuxième. Personnellement il m’arrive de cueillir deux feuilles sans me piquer et la troisième bam ! J’ai le bout du doigt qui me pique jusqu’à la fin de la journée.

Le lac du Clou

C’est comme ça, l’ortie ça se mérite. On n’a pas toujours des gants sur soi (en plus avec des gants je suis manche, j’arrive pas à plier les feuilles correctement). Bref j’aurais du manger plus d’ortie parce que je suis à deux doigts de caler dans la dernière montée vers le lac du Clou. Pour me donner du courage je brandis mes bâtons de rando en criant

Au mental ! Au mental !

faisant référence à une vidéo faite par un trailer que mon mari m’a montrée il y a quelques temps. Cette vidéo m’avait faite mourir de rire. Le trailer descend dans le brouillard en disant :

On va tous crever ! Quel sport à la con ! Je pourrais être dans mon canapé… Un canapé en cuir… et j’ai la VOD en plus…

Il se tape un bon délire pendant une minute. Il finit par se motiver en hurlant :

On y va au mental !

Mon mari me demande si je veux manger une pâte d’amande et je refuse en criant :

Au mental ! Au mental !

Et je redémarre cramponnée à mes bâtons (merci à eux). Mon mari se marre ! En fait je commence à avoir la dalle sérieusement.

le lac du Clou

Enfin le lac du Clou apparaît, cerné par la prairie d’alpage à 2373 m d’altitude. L’eau est très claire. Je plonge ma main dedans et je la trouve chaude. Il faut dire qu’au bord il y a très peu de profondeur (2 à 3 cm au plus). Nous nous posons sur un rocher plat et dévorons notre salade de quinoa avec grand plaisir. C’est fou la saveur que peut prendre une simple salade après 4 heures de marche ! Comme je trouve qu’il fait un peu frais, je rallonge les jambes de mon pantalon de rando et j’enfile ma veste.

vaches Tarines

Un éleveur monte avec ses vaches Tarines. Il les accompagne jusqu’à l’alpage du lac du Clou puis il repart. Les vaches de montagne ont la belle vie. Elles broutent les prairies des alpages pleines de fleurs et de plantes médicinales, elles prennent des bains dans les lacs d’altitude et font la sieste tranquilles. Le troupeau compte dix vaches, toutes sont aussi propres que les vaches qui défilent au salon de l’agriculture. Après notre repas nous faisons une sieste de vache 😀  Je flotte délicieusement entre deux eaux lorsque j’entends une sorte de souffle sur ma gauche :

Mpfff ! Mpfff !

J’ouvre un œil et je vois une Tarine à trois mètres de moi qui me regarde l’air de se dire :

Tiens, en voilà qui font la sieste dans notre prairie…

Surprise que j’ouvre les yeux, elle part voir d’autres randonneurs qui se sont installés plus loin. Au-dessus de nous, quelques névés subsistent après les chutes de neiges de cet hiver. Nous décidons de nous payer le luxe d’aller toucher la neige en juillet. En montant voir les névés, nous apercevons un chamois qui nous observe depuis la crête rocheuse qui nous surplombe. Dès qu’il voit qu’il est repéré il quitte la crête pour rejoindre l’alpage et s’éloigner en bondissant avec agilité entre les rochers et les touffes d’herbes.

les alpages et les névés

Descente en mode chamois

Comme le ciel commence à se couvrir, nous décidons de redescendre. Sait-on jamais, si la météo s’est trompée… A peine arrivons-nous à la hauteur des maisonnettes en ruines situées au-dessus du barrage que le soleil a complètement disparu et le ciel a pris une couleur grise menaçante. Les premières gouttes de pluie tombent. J’ai une veste déperlante et mon mari un coupe vent à manches courtes, étanche pour un certain temps en cas de pluie fine. Arrivé au barrage, il pleut ferme. En fait de rares averses, c’est un déluge et il est 13h00 !! Étant donné que nous n’avons pas de quoi nous changer, ça ne sert à rien de nous abriter quelque part à moins de vouloir prendre froid. Vu la tronche du ciel il ne faut pas compter sur une accalmie avant un bout de temps. Si ça se trouve il va pleuvoir plusieurs heures.

C’est là que vous allez découvrir mon côté chamois. Nous continuons donc notre descente au pas de course. Une fois sur la piste principale la pluie redouble d’intensité, nous sommes déjà trempés. Là où c’est moins drôle c’est que quelques éclairs commencent à faire leur apparition et le tonnerre roule son tambour entre les sommets environnants. D’après la vitesse du son et mes calculs, l’orage est à 2 km environ. Donc pas directement sur nous mais tout de même, ce genre d’expérience te remet illico à ta place : un simple élément vivant qui fait partie du tout. Mon mari porte les bâtons sur son sac à dos, vu que pour la descente nous n’en avons pas besoin. Je me dis qu’il faut qu’on se grouille de quitter ces espaces découverts pour éviter qu’il ne se transforme en paratonnerre, même si les bâtons ont la pointe en bas !

anémone

Nous quittons la piste principale et enfilons le sentier monotrace qui descend jusqu’au replat rocheux.A cet endroit très exposé, nous ne traînons pas pour rejoindre la forêt de conifères. Là, à l’abri des mélèzes, la pluie est un peu moins drue. Le tonnerre continue de gronder mais l’orage reste à distance de nous. Pour ne pas avoir froid j’adopte un rythme rapide. Je descends tellement vite dans la forêt que mon mari a du mal à me suivre !!! J’ai fait mon premier trail 😀 Arrivés au hameau du Monal, nous voyons toute une ribambelle de randonneurs qui s’abrite sous les débords de toits. Mon mari ruisselant les regarde et leur dit :

Vous attendez le Tour de France ? Il passe par là ?

Un peu interloqués, il leur faut quelques secondes pour rigoler. Ils doivent se demander qui sont ces deux fadas qui trouvent le moyen de faire de l’humour à deux balles alors qu’ils n’ont plus une parcelle de vêtement sec sur le dos. J’ai rabattu la capuche de ma veste déperlante sur ma casquette. Cela m’évite de sentir l’eau ruisseler dans mon cou. La casquette est ultra pratique pour l’effet gouttière, la visière évacue l’eau sur les côtés, ce qui empêche d’être aveuglé par la pluie. Normalement les sourcils sont là pour remplir cet office mais sous une pluie battante comme celle-là, les sourcils ne suffisent plus du tout ! Le pantalon de rando me colle aux mollets à chaque pas. J’ai les doigts rouges et engourdis mais comme je marche comme Lara Croft, je n’ai pas froid. Nous quittons le Monal au pas de course, dévalons la prairie et rejoignons la piste puis la route sous une pluie de plus en plus forte agrémentée de rafales de vent. Le pied total ! A la fin je cours sur la route parce que je vois la voiture en bas en hurlant :

Au mental ! Au mental !

Je ne suis pas en train de me demander comment je vais faire vu que je n’ai rien pour me changer. Non. Je suis dans l’instant présent avec un seul et unique objectif en tête depuis que j’ai quitté le barrage : rejoindre la voiture.

orchidée sauvage

Quelques enseignements à retenir

Les capacités de notre corps sont étonnantes, pas une douleur, pas froid, pas faim, juste une ou deux gorgées d’eau au camel back pendant cette descente express. Arrivée à la voiture, j’entreprends de retirer mes chaussures pour pouvoir enlever mon pantalon de rando. J’ai les doigts engourdis et beaucoup de mal à défaire les doubles nœuds des lacets. Après avoir bataillé un peu je réussis à retirer mes chaussures et je me rends compte qu’elles sont étanches, j’ai les pieds secs ! Je finis en tenue minimaliste, une veste de trail de mon mari sur le dos, en slip avec une vieille couverture que nous avons dans le coffre de la voiture qui me fait office de minijupe ! Vous me pardonnerez de ne pas avoir fait de photo… Je dors une grande partie du trajet de retour. Arrivés à la maison nous prenons un bain relaxant à l’arnica pour la récupération. J’ai adoré cette excursion, même avec la pluie.

Rhododendrons sauvages

C’était une magnifique journée dont je tire les enseignements suivants :

Même si la météo annonce beau, le temps peut se gâter à tout moment. La météo n’est pas une science exacte (on le savait mais j’ai pris la peine de vérifier pour vous). Les précipitations se fichent pas mal des prévisions et il est de bon ton de l’avoir en tête.

Pour les prochaines randonnées, prévoir une tenue de rechange et des serviettes éponges au cas où… Cela évite de finir enroulée dans une couverture douteuse, aux motifs d’un autre monde et qui pue la poussière mais que tu trouves chouette parce qu’elle est SÈCHE !

Je suis capable de mettre quatre heures pour monter au lac du Clou et seulement une heure et quart pour en redescendre. De là à dire que je suis sportive, il n’y a qu’un pas que je franchis. Je pourrai rajouter ça sur mon CV.

On peut être habillé et trempé comme si on sortait de son bain juste à cause de quelques gouttes de pluie : une goutte prise isolément n’est rien mais plusieurs gouttes ensemble, ça change tout et ça s’appelle un orage. L’union fait la force et tous ensemble on fait plus d’effet que tout seul. Ça ne vaut pas que pour les gouttes d’eau, c’est aussi valable pour nous en tant qu’individus. A méditer…

Avec le mental on est capable de faire des trucs de fou. Je le savais déjà mais c’est bien de l’expérimenter. Focaliser sur l’objectif, vivre l’instant présent à fond, c’est ça qui permet d’avancer quand c’est difficile. Une fois sorti de la tempête, il est toujours temps de se poser pour analyser et faire un retour d’expérience. Avec quelques ajustements et corrections, la prochaine fois on sera encore plus fort !

Définitivement j’adore les fleurs, ça fait partie de moi, j’ai sûrement dû être une fleur à un moment de mon évolution personnelle… Je pourrais passer des heures à les observer et à les photographier.

Vive la montagne ! Et vous, c’était quand votre dernier bol d’air ? Avec ou sans douche intégrée ? Racontez-moi ça dans les commentaires.

Prenez soin de vous et profitez de ce temps des vacances pour apprendre à ne rien faire, ce n’est pas si facile…

Isabelle.


Photos : Ralph Grillot – Isabelle Ducau

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4 Commentaires
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Svetlana
Svetlana
23 juillet 2018 22 h 03 min

Merci Isabelle pour ce beau récit haletant! J’y étais presque, sans l’effet mouillé! Je me suis bidonnée avec la remarque de votre mari sur le Tour de France! J’aurai aimé être là. J’adore aussi ces moments de randonnées en pleine nature. Nous sommes connectés directement à la Terre, aux éléments, aux animaux, et à nous… C’est magique. J’avais aussi envie de partager un moment grandiose que j’ai vécu avec mon ancien compagnon car c’est une histoire sur le mental: Nous étions en Islande et avions décidé d’aller sur le plus haut sommet à 2000m (en partant du niveau zéro) le… Lire la suite »

Svetlana
Svetlana
28 juillet 2018 21 h 32 min
Répondre à  Isabelle

Super pour vos tomates, j’espère que les autres vont donner aussi! 🙂