Voilà quelques jours que je sens les prémices du printemps ! Je sais bien qu’astronomiquement parlant, le printemps c’est le jour de l’équinoxe du même nom, mais la nature ne se trompe pas. Il y a des signes tangibles : les mésanges qui trimbalent des brindilles dans leur bec, les abeilles sauvages qui sortent de leurs loges et bourdonnent à tout va, les jonquilles et les crocus qui déploient leurs corolles… Je ne parle même pas des noisetiers qui ont fini de fleurir ! Ce week-end, la douceur printanière nous a vissé au banc du jardin une partie de l’après-midi pour écouter l’air songeur mon ado préférée nous raconter ses rêves de voyages au Japon. Avec un effort surhumain pour sortir de cette douce torpeur, j’ai accepté la proposition de mon mari d’aller faire une balade du côté de Vignieu pour découvrir la Chapelle des Ayes. Je n’ai pas regretté ! Jugez-en par vous-même.
Après un petit trajet en voiture, nous nous sommes garés devant l’entrée du château de Chapeau Cornu, un château situé sur la commune de Vignieu et dont j’aurai très certainement l’occasion de vous reparler.
Mon mari prévoyant avait emporté l’appareil photo, au cas où l’envie me prendrait de mettre quelques images dans la boîte. Il est adorable de penser à ça parce que lorsque nous partons en balade ensemble, il passe plus de temps à m’attendre qu’à marcher. Je n’arrive guère à parcourir plus de 500 mètres sans sortir l’appareil photo. Il suffit d’une fleur sur le talus, d’une curiosité au détour du chemin ou d’un panorama inspirant pour que je me jette sur l’appareil. Alors il attend. Et des fois il s’endort !
Il prie pour que le soleil se couche plus vite, parce que sans lumière, plus de photos. En général, le trajet de retour se fait d’une traite parce que je n’ai plus de matière pour travailler. Mais il sait aussi que c’est pour la bonne cause. Hier après-midi, il m’a regardé en souriant et il m’a dit
Je sens bien un article sur la Chapelle des Ayes là …
Pfff ! Je ne peux rien lui cacher ! Donc, comme j’ai fait plein de photos, je suis bien obligée de les partager avec vous. Des photos qui restent sur une carte SD ou dans un fichier d’ordi, c’est triste comme un printemps sans fleurs.
Des indices de printemps partout
Quand je vous disais que le printemps était déjà là et qu’il se moquait bien du calendrier, j’ai eu la confirmation de mes soupçons tout au long du chemin. Le sentier que nous avons emprunté dans le sous-bois qui s’étire en contre-bas du Château de Chapeau Cornu était émaillé de fleurs printanières : scilles, violettes, anémones, ancolies, …
Je m’arrêtais tous les trois pas. C’est là que mon mari s’est inquiété de savoir si nous aurions fini la balade avant la nuit !
J’ai même entendu le printemps murmurer à mes oreilles. Le chant des oiseaux est devenu plus soutenu, plus fourni, ils sont plus nombreux à piapiater à qui mieux-mieux. Mais par-dessus toute cette symphonie pastorale, j’ai entendu une série de coups secs résonner dans les bois. On aurait dit que le printemps toquait à la porte. Le pic épeiche avait commencé à travailler ses gammes de percussions sur les troncs des grands arbres. Voilà un signe qui ne trompe pas. Fermez les yeux, respirez un grand coup profondément et écoutez le tambourinage du pic épeiche sur les troncs des arbres. J’adore ce bruit au moins autant que l’odeur de l’humus. Oui, je sais, je suis bizarre. Comme dit ma louloute, je suis une maman farfelue. La semaine dernière, elle avait emprunté à la bibliothèque un album dont le titre était « Les Farfelus ». L’histoire racontait que les farfelus sont des gens qui vivent un peu en décalé. Ils parlent aux plantes, ils câlinent les arbres, ils rigolent sans raisons apparentes même lorsqu’ils sont tous seuls, il s’intéressent aux petites choses… Elle m’a regardée et elle m’a dit
En fait, les Farfelus font comme toi Maman ! Tu es une maman farfelue !
Voilà, je suis farfelue et j’assume totalement ma farfelitude (encore un néologisme, l’académie française va finir par me faire un procès !)
Une balade campagnarde
L’herbe des prés reverdit à vue d’œil les chevaux et les ânes paissent avec bonheur les pousses tendres, les poules gratouillent frénétiquement pour trouver des trésors protéiques enfouis dans le sols et les humains se baladent.
Nous avons croisé plusieurs promeneurs lors de notre escapade vers la Chapelle des Ayes ce dimanche. Pourtant il était déjà tard lorsque nous nous sommes mis en route. J’aime bien la lumière de fin d’après-midi, elle est chaude et rasante, elle sculpte les fleurs et les pierres en leur donnant du relief par de subtils jeux d’ombres.
Nous sommes arrivés par une route tranquille dans un lieu-dit tranquille où nous avions l’intention de passer tranquillement. Or, à peine ai-je eu le temps de dire à mon mari
Tu as vu ? Il y a deux oies.
L’une d’elles nous a aperçu. Damned ! Elle est passée illico en mode torpille et a foncé vers nous, tête baissée. Puis, arrivée à distance suffisante pour nous impressionner, elle s’est mise à cacarder bruyamment entraînant dans son réquisitoire sa compagne d’enclos. Une oie qui cacarde ça fait plus de bruit qu’un chien qui aboie. Les chiens du voisin ont décidé de défendre leur honneur de gardien du foyer. Ils étaient trois derrière le grillage. Deux bâtards aux poils hirsutes se sont mis à japper pour essayer de faire plus fort que les oies sous l’œil bienveillant d’un épagneul breton qui estimait ne pas avoir besoin de se fatiguer vu l’ambiance sonore du moment. Alors le cheval d’en face a levé le museau de son herbe tendre, fâché semble-t-il de tant de tapage. Il n’a pas hésité à manifester son mécontentement par de puissants hennissements.
La tranquillité venait de décéder sous nos yeux. Soucieux du calme des habitants de ce paisible lieu-dit, nous avons forcé l’allure afin de nous soustraire à la vue de cette gent animale fort expressive. Les joies de la campagne et son charme bucolique nous avaient submergé. J’ai pensé à Chico, mon âne philosophe, qui n’aurait pas manqué d’apporter sa touche personnelle en pareilles circonstances.
Découverte de la Chapelle des Ayes
Après avoir échappé à la symphonie rurale, nous avons traversé la route départementale sans nous faire écraser par les gens pressés d’aller je ne sais où. Puis nous avons emprunté le chemin qui mène à la Chapelle des Ayes. Un chemin qui se prélasse en se glissant entre les vertes prairies et qui monte tout doucement vers la chapelle. Il ne va pas plus loin. En s’élevant, on bénéficie d’une vue sur le village de Vignieu en contre-bas et sur le Château de Chapeau Cornu sur le coteau d’en face.
La Chapelle des Ayes est construite à l’emplacement où un cultivateur du coin avait affirmé avoir vu la Vierge en 1793. Un premier édifice avait été construit en 1856 : il s’agissait d’une croix en bois de châtaignier dressée sur le lieu de l’apparition et protégée par une chapelle sommaire. Or il advint que cette croix exsuda un liquide rougeâtre qui n’était pas sans rappeler le sang. Cet événement marqua vivement les habitants de Vignieu et en 1859, le maire de l’époque, Victor Subit, donna son accord pour qu’une souscription soit lancée en vue d’agrandir la Chapelle des Ayes. De nombreux pèlerins se rendaient sur les lieux et plusieurs récits de guérisons miraculeuses ont été rapportés. La chapelle trop petite pour accueillir tous ces fidèles a été de nouveau reconstruite plus grande et plus belle par le curé de Vignieu en 1889.
Aujourd’hui encore, elle est le lieu de pèlerinages et de cérémonies notamment pour les fêtes de Pâques. Le lieu est très paisible et appelle au repos. Un petit banc de pierre adossé au mur de la chapelle invite à une pause de réflexion, d’introspection ou de méditation. L’intérieur est sobre mais les vitraux chaleureux viennent éclairer l’autel d’une douce lumière.
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Posée comme une bijou dans l’écrin vert de la végétation environnante, la Chapelle des Ayes passe inaperçue pour les pressés non curieux et pour les gens qui ne sont pas assez farfelus pour s’intéresser aux petites choses.
Après avoir admiré tout ce qu’il y avait à portée de mes yeux et après avoir rempli ma tête et ma carte SD de toutes ces belles choses, j’ai pris le chemin du retour.
Nous avons marché d’un bon pas sous le soleil déclinant, les oies étaient rentrées, seuls les bâtards hirsutes ont jugé bon de nous rappeler qu’ici c’était chez eux, vu que nous n’avions apparemment pas compris la première fois. Le cheval n’a pas levé le nez, quelques aboiements, ça allait encore. Nous avons rejoint la voiture en contournant le Château de Chapeau Cornu. Mon mari s’est tourné vers moi lorsque nous nous sommes retrouvés dans l’allée qui mène au château :
Tu veux faire des photos du château ?
Je ne sais pas s’il voulait me taquiner ou s’il était sincère. Un peu les deux sûrement. Cependant, je penche pour la deuxième hypothèse. Il sait que ça me fait plaisir et lui non plus ne boude pas les belles choses. Qui se ressemble s’assemble dit la sagesse populaire…
Il n’y a plus de soleil, la lumière est trop terne, je reviendrai pour le château. Contentons-nous de la Chapelle des Ayes pour aujourd’hui.
Nous sommes remontés dans notre carrosse emportant avec nous tous les bénéfices de cette jolie balade.
Isabelle
Photos : Isabelle Ducau
Sources historiques : Extrait de la Semaine Religieuse de Grenoble
Bonjour Isabelle,
Une magnifique balade qui me rapelle les miennes…..appareil photo en main, les yeux à la recherche du moindre végétal ou animal à photographier…les chiens sont présents, mais ils sont silencieux 🙂 très belle journée printanière !!
Merci Martine ! 🙂
Bonne journée Isabelle Comme j’aurai aimé ètre un petite souris cachée dans votre poche pour faire cette promenade »merveilleuse »…respirer l’air pur , sentir toutes les fleurs , dire »bonjour aux arbres…me détendre , partir aussi à la découverte de ce coin …Votre mari a du prendre quelque repos bienfaiteur…je crois aussi que j’aurai aimé me couchée dans l’herbe un instant pour prendre les bienfaits de ces lieux…Je vois qu’il y a encore des coins extra à découvrir Profitez de votre chance ;sur internet , j’ai cherché par curiosité cette petite région . Là , quelle surprise de constater la richesse… Lire la suite »
Merci bien Anne-Marie. Je suis bien consciente d’habiter une très jolie région. Je pense que toutes les régions ont leurs atouts pour peu que l’on se donne la peine d’y être attentif !
Bonne journée 🙂
Merci pour ce beau cadeau littéraire que vous nous faites, à nous Vignolais.
Félicitations
Merci Monsieur le maire, j’ai pris plaisir à mettre en valeur ce patrimoine et ce coin de nature ! 🙂
Sur la colline du côté de chapeau cornu mais au dessus de l’église de Vignieu, il y a une madone. on peut la deviner sur votre photo http://lescarnetsdubienetre.com/wp-content/uploads/2017/03/village-de-Vignieu.jpg en partant du clocher avec la pointe de la souris rejoignez la crête des arbres, là laissez la souris parcourir la crête mais vers la gauche, en montant donc. La souris va butter contre une petite bosse. Si la souris se penche, ou descend en rappel à la verticale de cette bosse, elle trouvera un peu à gauche une ligne blanche verticale dans un espace dégagé. Si l’on s’y rend à pied,… Lire la suite »
Bonjour Alain,
Je connais l’emplacement de cette madone mais je n’y suis encore jamais allée. On la voit assez bien lorsqu’on arrive de Bornemoud et qu’on descend sur Vignieu, elle se dresse au milieu des arbres à mi-pente du coteau qui surplombe Vignieu. Un coin à découvrir qui fera peut-être l’objet d’un autre billet, qui sait ? 😉
Merci Isabelle pour ce reportage photo – particulièrement réussi – ( et aussi grâce à la gentille prévoyance de votre mari …..) ce qui nous permet de profiter avec un peu d’avance du printemps, et
de découvrir et de connaître l’histoire de cette si jolie Chapelle des Ayes.
Merci Antoinette ! 🙂
Que de belles photos, qui sentent bon le printemps ! C’est ma saison préférée <3
Merci Suny, moi aussi c’est ma saison préférée, comme dirait mon ado, je kiffe ! 😉